Autisme, TDAH, Troubles DYS : Enquête sur un Échec Collectif

Autisme, TDAH, Troubles DYS : Enquête sur un Échec Collectif

Délais de diagnostic interminables, reste à charge écrasant pour les familles, exil forcé vers la Belgique, enfants privés d’école… Alors que 10 à 15 % des enfants naissant chaque année seraient atteints d’un trouble du neurodéveloppement selon le rapport du Sénat n°659 (2022-2023) — soit 70 000 à 105 000 enfants par an —, notre pays peine à les accompagner. Cette enquête fait le point sur les données officielles, les témoignages de familles et les pistes d’amélioration.

Chiffres clés à retenir

  • 1 personne sur 6 concernée par un TND en France
  • 70 000 à 105 000 naissances par an avec un TND
  • Plusieurs années d’errance diagnostique en moyenne
  • 1 500 à 3 000 €/mois : coût estimé d’un accompagnement intensif (estimation associations de parents)
  • 3 000 €/an de reste à charge moyen pour les familles

Sources : Stratégie nationale TND 2023-2027, Rapport du Sénat 2023, Cour des comptes 2018

Sophie se souvient de cette phrase, prononcée par une pédiatre après des mois d’errance : « Madame, votre fils n’a rien, vous êtes juste une mère anxieuse. » Théo avait alors 3 ans. Il ne parlait pas, évitait le regard, alignait ses jouets pendant des heures. Il faudra encore deux années de combat, de portes fermées et de nuits blanches avant qu’un diagnostic tombe enfin : trouble du spectre de l’autisme.

Théo a aujourd’hui 8 ans. Il progresse, grâce à une prise en charge intensive que ses parents financent à hauteur de 3 500 euros par mois. « Nous avons vendu notre maison », confie Sophie. « C’était ça ou abandonner notre fils. » Un sacrifice financier loin d’être isolé : selon la Cour des comptes (2018), le reste à charge moyen pour les familles s’élève à 3 000 euros par an — et bien davantage pour celles qui recourent à des prises en charge intensives.

Cette histoire n’est pas exceptionnelle. Elle est celle de centaines de milliers de familles françaises confrontées aux troubles du neurodéveloppement — autisme, TDAH, troubles DYS, troubles du développement intellectuel. 700 000 personnes sont concernées par l’autisme en France selon l’Inserm, dont 100 000 enfants. Et les TND dans leur ensemble touchent 1 personne sur 6 (Maison de l’Autisme). Des familles qui découvrent que la France, septième puissance économique mondiale, peine à accompagner dignement ses enfants différents.

L’Ampleur des TND en France : Prévalence et Données Épidémiologiques

Drapeau tricolore français flottant sur fond vert, symbolisant le système de prise en charge des TND en France

Autisme, TDAH, Troubles DYS : Des Chiffres en Forte Augmentation

Les données récentes donnent la mesure du phénomène. Selon le rapport du Sénat n°659 (2022-2023), 10 à 15 % des enfants naissant chaque année seraient atteints d’un TND. Avec environ 700 000 naissances annuelles en France, cela représente 70 000 à 105 000 enfants chaque année — soit l’équivalent d’une ville comme Cannes ou Antibes, tous les douze mois. Le chiffre de 35 000 encore cité par certaines sources gouvernementales (handicap.gouv.fr) apparaît aujourd’hui largement sous-estimé.

L’autisme, longtemps considéré comme rare, touche désormais 1 à 2 % de la population en France selon les estimations les plus récentes (ameli.fr), soit environ 700 000 personnes dont 100 000 enfants (Cour des comptes, 2018). À l’échelle internationale, certaines études récentes évoquent des taux atteignant 1 enfant sur 40. En 2014, on parlait encore d’1 enfant sur 150. Cette augmentation importante s’explique principalement par l’évolution des critères diagnostiques — notamment l’intégration du syndrome d’Asperger dans le spectre autistique en 2013 avec le DSM-5 — et l’amélioration du repérage, mais elle révèle surtout l’ampleur d’un phénomène longtemps sous-estimé.

Le TDAH (trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) concerne 6 % des enfants et 3 % des adultes (CHU Montpellier – CeAND), soit plusieurs centaines de milliers de jeunes en France. Les troubles DYS — dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, dysphasie — affectent 6 à 8 % des enfants par classe d’âge (CHU Montpellier – CeAND). Ces chiffres ne tiennent pas compte du fait que plus de 50 % des personnes avec un TND présentent un second trouble neurodéveloppemental associé — un phénomène de comorbidité particulièrement fréquent (Maison de l’Autisme).

« La prévalence des TND a été longtemps sous-estimée en France. Nous rattrapons aujourd’hui un retard diagnostique considérable, ce qui explique en partie l’augmentation apparente des cas. »

« Il y a encore une tendance à banaliser les symptômes et à se dire qu’on attend pour voir comment ça évolue. » — Pr Richard Delorme, pédopsychiatre, chef du service de psychiatrie de l’enfant à l’hôpital Robert-Debré (Paris)

Derrière les Statistiques : L’Impact sur les Familles

Les statistiques ne racontent pas les nuits d’insomnie des parents qui cherchent des réponses sur internet à 3 heures du matin. Elles ne décrivent pas les regards dans les supermarchés quand un enfant fait une crise sensorielle. Elles n’expliquent pas la culpabilité qui ronge ces mères et ces pères à qui on a trop souvent répété que « c’est de leur faute ».

« On nous a dit que c’était de notre faute. Qu’on ne savait pas éduquer notre enfant. Qu’on était de mauvais parents. Il a fallu trois ans pour qu’on nous écoute enfin. » — Marie, maman d’un enfant TDAH diagnostiqué à 9 ans

L’âge moyen du diagnostic de l’autisme reste autour de 6-7 ans en France, alors que les premiers signes peuvent être détectés dès 18 mois (ARS Bretagne). Le délai d’attente dans les établissements spécialisés atteint 3 ans minimum selon la HAS (Question parlementaire, Assemblée nationale), et 446 jours en moyenne pour obtenir un diagnostic en CRA (Cour des comptes, 2018). Des années pendant lesquelles l’enfant grandit sans accompagnement adapté, pendant lesquelles les difficultés s’accumulent, pendant lesquelles la famille s’épuise. Des années perdues, alors que toutes les études scientifiques démontrent que l’intervention précoce est déterminante pour le développement de l’enfant.

Comparaison internationale

  • Royaume-Uni : Délai moyen de 1 à 1,5 an pour les enfants, 2 à 2,5 ans pour les adultes. Disparités pouvant atteindre 5 ans selon les zones. 90% des personnes attendent plus de 13 semaines (recommandation NICE). 227 813 personnes en liste d’attente (sept 2025).
  • Suède : Coordination santé/éducation et prise en charge à 100% dans le public. Mais délais longs (1 à 2 ans) dans le système public, créant un marché privé coûteux (3 000 à 4 000 € par diagnostic).
  • Italie : Loi 104/1992 garantissant l’inclusion scolaire avec enseignant de soutien dédié. 99,6% des élèves handicapés en école ordinaire (record européen).

La France affiche une prévalence comparable à ses voisins, mais partage avec le Royaume-Uni et la Suède les mêmes défis de délais diagnostiques. L’Italie reste un modèle pour l’inclusion scolaire.

Le Parcours Diagnostic : Délais, Inégalités et Difficultés d’Accès

Obtenir un Diagnostic TSA ou TDAH : 6 Mois Minimum, Souvent des Années

Le parcours commence toujours de la même façon. Un parent s’inquiète. Son enfant ne parle pas comme les autres, ne joue pas comme les autres, n’apprend pas comme les autres. Il consulte son médecin traitant, qui le rassure ou l’oriente vers un spécialiste. Et c’est là que tout se complique.

Les Centres de Ressources Autisme (CRA), censés être la porte d’entrée vers le diagnostic, croulent sous les demandes. Selon la Cour des comptes, le délai moyen constaté dans les CRA est de 446 jours entre la première demande et le diagnostic. Dans certaines régions, il est courant d’attendre plus d’un an pour obtenir un premier rendez-vous, et jusqu’à deux ans pour un diagnostic complet avec mise en place des suivis.

Fait révélateur : selon la troisième étude d’impact de la stratégie nationale autisme (Ipsos pour la Délégation interministérielle, 2022), réalisée auprès de 11 880 personnes concernées, les parents et les enseignants restent les acteurs majoritaires du repérage précoce, contre seulement 15 % pour les médecins généralistes, pédiatres, médecins scolaires et autres professionnels de santé. Ce sont des mères et des pères, sans formation médicale, qui identifient ce que le système de santé français peine à repérer suffisamment tôt.

Autisme au Féminin : Le Sous-Diagnostic des Filles TSA

On vous propose la lecture de : Autisme Chez Les Filles : Un Trouble Profond Et Invisible En 2025

Le problème est encore plus aigu pour les filles. Officiellement, l’autisme toucherait 4 garçons pour 1 fille. Mais ce ratio, établi sur des critères diagnostiques historiquement masculins, est de plus en plus contesté. Les études récentes suggèrent un ratio réel de 2 à 3 garçons pour 1 fille.

Les filles autistes développent très tôt des stratégies de camouflage social — ce que les spécialistes appellent le « masking ». Elles observent, imitent, se fondent dans la masse. Leurs intérêts spécifiques sont souvent plus « acceptables » socialement : les animaux plutôt que les trains, la lecture plutôt que les chiffres. Résultat : elles passent entre les mailles du filet.

Les conséquences sont préoccupantes. En moyenne, les filles sont diagnostiquées deux ans plus tard que les garçons. Ce retard a un prix : selon une étude française de 2022 publiée dans Frontiers in Behavioral Neuroscience par l’équipe du Dr Fabienne Cazalis (CNRS), 88 % des femmes autistes déclarent avoir été victimes de violences sexuelles au cours de leur vie — un chiffre qui traduit leur vulnérabilité face à des situations sociales qu’elles ne parviennent pas à décoder.

Inégalités Territoriales : Quand le Code Postal Détermine l’Accès aux Soins

À ces difficultés structurelles s’ajoutent des inégalités territoriales marquées. Le nombre de pédopsychiatres varie considérablement selon les départements, certains territoires ruraux étant presque totalement dépourvus de spécialistes. Selon un rapport de l’IGAS, cette pénurie « réduit l’offre de soins et entraîne des inégalités sociales et territoriales d’accès à la santé ». Un enfant né à Paris n’aura pas les mêmes chances qu’un enfant né dans un département rural.

Les délais de traitement des dossiers MDPH varient également de façon importante. Pour une Prestation de Compensation du Handicap (PCH), si le délai moyen national est de 5,9 mois selon la CNSA (2023), les disparités territoriales font que certaines familles attendent 18 mois à 2 ans. Pendant ce temps, les factures s’accumulent et les parents s’endettent.

À retenir : le diagnostic en France

  • 446 jours d’attente en moyenne dans les Centres Ressources Autisme (Cour des comptes 2018)
  • 79% des parents remarquent des signes inhabituels chez leur enfant avant l’âge de 2 ans
  • +1,5 à 2 ans de retard diagnostique moyen pour les filles par rapport aux garçons
  • Inégalités territoriales : 25% des départements n’ont aucun pédopsychiatre. Le nombre de pédopsychiatres a chuté de 34% entre 2010 et 2022.

Sources : Cour des comptes 2018, Rogers & DiLalla 1990, Sénat 2025

Le Coût de la Prise en Charge TND : Reste à Charge et Impact Financier

1 500 à 3 000 € par Mois : Le Poids Financier pour les Familles

La prise en charge d’un enfant autiste représente un coût mensuel moyen de 1 500 à 3 000 euros selon l’intensité de l’accompagnement nécessaire. Psychomotricité, ergothérapie, orthophonie en libéral, accompagnement éducatif, transports… Les postes de dépense sont nombreux. Les aides publiques (AEEH de base à 151,80 €/mois, compléments, PCH) restent largement insuffisantes face aux besoins. Le reste — l’immense reste — est à la charge des familles.

Jeune enfant assis au sol concentré sur une activité de dessin avec des crayons de couleur, illustrant le développement de la motricité fine et de la concentration chez les enfants avec TND

Le « forfait précoce », mis en place dans le cadre des Plateformes de Coordination et d’Orientation (PCO), représente une avancée. Il permet la prise en charge de certaines interventions (psychologie, ergothérapie, psychomotricité) sans attendre le diagnostic. Mais il reste insuffisant face à l’ampleur des besoins.

« Nous avons vendu notre maison pour financer la prise en charge de notre fils. Nous n’avions pas le choix. C’était ça ou le regarder régresser sans rien faire. » — Florent Chapel, président d’Autisme Info Service, père d’un adolescent autiste

On vous propose la lecture de : AEEH Montant 2025 : Les Compléments Et Ses Catégories

Aidants Familiaux : Quand Travailler Devient Impossible

Face à ces charges financières et à la complexité du parcours, de nombreux parents — majoritairement des mères — n’ont d’autre choix que de réduire ou d’arrêter leur activité professionnelle. Rendez-vous médicaux multiples, accompagnement scolaire défaillant, crises à gérer, dossiers administratifs interminables : le temps manque pour tout.

Les familles déclarent un besoin criant de répit. Selon la Cour des comptes, le faible nombre de structures temporaires ou « de répit » à disposition des familles est un problème majeur, accru par les risques de rupture de parcours.

« L’épuisement parental n’est pas un luxe de parents fragiles. C’est une réalité clinique que nous observons quotidiennement dans nos consultations. Ces familles ont besoin d’un soutien structurel, pas de conseils sur la gestion du stress. »

L’Exil vers la Belgique : Environ 8 200 Français Accueillis à l’Étranger

Quand les solutions manquent en France, certaines familles n’ont plus qu’une option : l’exil. Aujourd’hui, 8 258 Français en situation de handicap sont accueillis dans des établissements en Belgique wallonne — dont 7 008 adultes et 1 250 enfants.

Louis avait 4 ans et demi quand il a dû quitter ses parents pour rejoindre un établissement belge, à trois heures de route de chez lui. « Quand on vous annonce qu’il faut penser à l’étranger pour votre enfant, il faut l’avaler », confie son père. Aucun institut français ne voulait accueillir ce petit garçon autiste et épileptique.

Le gouvernement a annoncé vouloir mettre fin à ces « départs non souhaités ». Un plan de 90 millions d’euros a permis la création de 2 500 nouvelles solutions en France, et 1 000 solutions supplémentaires pour les enfants sont prévues. Mais face à des listes d’attente qui comptent des milliers de noms, l’équation reste complexe.

Inclusion Scolaire et TND : Entre Progrès et Réalité du Terrain

Enfant d'âge préscolaire manipulant un puzzle éducatif coloré en classe, démontrant l'apprentissage par le jeu et le développement cognitif adapté aux troubles neurodéveloppementaux

#JaiPasÉcole : Des Enfants Privés de Leur Droit à l’Éducation

Les chiffres officiels semblent encourageants. En 2005, 130 000 élèves en situation de handicap étaient scolarisés en milieu ordinaire. Aujourd’hui, ils sont plus de 520 000 (handicap.gouv.fr). Une multiplication par quatre en moins de vingt ans.

Mais ces statistiques masquent une réalité plus nuancée. Être « inscrit » à l’école n’est pas synonyme d’être « scolarisé ». Selon la DEPP, 7,6% des élèves en situation de handicap du premier degré sont encore scolarisés à temps partiel en 2024 (DEPP, Note d’Information n° 25-63). De nombreux enfants autistes ne sont accueillis que quelques heures par semaine. D’autres sont régulièrement renvoyés chez eux faute d’accompagnant.

La campagne #JaiPasÉcole, lancée par l’UNAPEI en 2019 et relancée chaque année depuis, met en lumière l’ampleur du phénomène : des milliers d’enfants en situation de handicap privés de leur droit fondamental à l’éducation. En avril 2023, le Conseil de l’Europe a condamné la France pour violation de la Charte sociale européenne, pointant notamment « l’absence de mesures efficaces pour remédier aux problèmes liés à l’inclusion des enfants handicapés dans les écoles ordinaires » (Conseil de l’Europe). L’État a également été condamné à plusieurs reprises par les tribunaux administratifs pour carence dans la mise en œuvre des décisions d’orientation de la CDAPH.

AESH : 134 800 Professionnels, une Formation de 60 Heures

La France compte aujourd’hui 134 800 AESH (Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap) — le deuxième corps de l’Éducation nationale après les enseignants (DEPP, Panorama statistique 2024-2025). Et pourtant, à la rentrée 2025, 48 726 élèves notifiés pour un accompagnement AESH étaient sans solution — soit près d’un élève sur sept (données DGESCO, commission d’enquête parlementaire, octobre 2025). C’est 35% de plus qu’en 2024, où ils étaient 36 186.

Les disparités territoriales sont « vertigineuses », selon le député Sébastien Saint-Pasteur, rapporteur de la commission : 43% des élèves notifiés sont sans AESH dans les Bouches-du-Rhône, contre seulement 3% dans l’académie de Bordeaux.

Au-delà du nombre, c’est la formation qui interroge. 60 heures : voilà le temps minimum consacré à former ces professionnels (Décret n° 2018-666 du 27 juillet 2018). Soixante heures pour comprendre l’autisme, le TDAH, les troubles DYS, le polyhandicap, les troubles du comportement…

IME : Des Listes d’Attente Plus Longues que les Places Disponibles

Pour les enfants nécessitant une prise en charge plus intensive, les Instituts Médico-Éducatifs (IME) représentent souvent la seule solution adaptée. Mais les places sont rares.

En l’absence de statistiques officielles de l’État sur les listes d’attente en IME, l’UNAPEI — première fédération française d’associations représentant les personnes en situation de handicap intellectuel (900 000 personnes, 350 associations) — a mené sa propre enquête auprès de 38 associations membres. Les résultats sont édifiants : 4 410 enfants sont en liste d’attente, soit plus que les 3 603 enfants actuellement accompagnés dans leurs établissements (Enquête UNAPEI, août 2025).

Dans l’Hérault, ce sont 700 enfants qui attendent une place en IME. Dans certains départements, l’attente peut durer plusieurs années.

En mai 2023, Georgio Loiseau, maire de Poses dans l’Eure, a entamé une grève de la faim de 8 jours pour alerter sur la situation de son fils Elyes, 12 ans, autiste, 45e sur la liste d’attente d’un IME qui n’ouvre que 3 places par an (France 3 Normandie). « À ce rythme-là, il n’est pas près d’être accueilli », avait-il déclaré. Il a finalement obtenu une place après cette mobilisation médiatisée.

Pourquoi ces chiffres viennent-ils d’une association ?

  • Aucune donnée officielle : L’État français ne publie pas de statistiques consolidées sur le nombre d’enfants en attente de place en IME
  • 4 410 enfants en liste d’attente selon l’enquête UNAPEI (38 associations, août 2025)
  • Plus d’enfants en attente que d’enfants actuellement accompagnés (3 603)
  • Jusqu’à 7 ans d’attente pour obtenir une place dans certains départements

Source : Enquête UNAPEI #JaiPasÉcole, août 2025 — L’UNAPEI est la première fédération française d’associations représentant les personnes en situation de handicap intellectuel (900 000 personnes, 350 associations)

Avancées 2024-2025 : PCO, Loi TND et Stratégie Nationale

PCO : Près de 90 000 Enfants Repérés Grâce au Diagnostic Précoce

Les Plateformes de Coordination et d’Orientation (PCO), créées en 2019, représentent une véritable avancée. Leur principe : permettre l’accès rapide à des bilans et des interventions précoces sans attendre le diagnostic formalisé.

Les résultats sont significatifs. En 2019, à la création des PCO, seulement 150 enfants étaient repérés via ce dispositif. Aujourd’hui, ce sont près de 90 000 enfants de moins de 12 ans qui ont été accueillis (83 000 enfants de 0 à 6 ans et 6 000 enfants de 7 à 12 ans). La France compte désormais près de 150 PCO sur l’ensemble du territoire.

Loi du 15 Novembre 2024 : Nouvelles Mesures pour le Repérage TND

La loi adoptée à l’unanimité le 5 novembre 2024 et promulguée le 15 novembre apporte plusieurs avancées concrètes. Deux examens de repérage des TND (à 9 mois et à 6 ans) seront désormais intégralement pris en charge par l’Assurance Maladie. La formation aux TND devient obligatoire pour les professionnels des crèches et des centres de loisirs.

Drapeau tricolore sur le balcon fleuri d'un immeuble haussmannien parisien, représentant l'accessibilité des services TND sur tout le territoire français

Des séjours de répit aidants-aidés sont enfin prévus et encadrés via la pérennisation du dispositif de relayage. La HAS a également publié le 23 septembre 2024 de nouvelles recommandations sur le TDAH, excluant la psychanalyse des approches recommandées et préconisant les interventions non médicamenteuses en première intention.

680 Millions d’Euros : Le Budget de la Stratégie Nationale TND

La Stratégie nationale 2023-2027 est dotée de 680 millions d’euros, contre 550 millions pour la période précédente. Le plan « 50 000 solutions » promet 1,5 milliard d’euros jusqu’en 2030.

Ces montants sont conséquents. Mais rapportés aux 70 000 enfants qui naissent chaque année avec un TND, ils représentent environ 9 700 euros par enfant sur la durée de la stratégie. Quand la prise en charge adaptée d’un seul enfant coûte 1 500 à 3 000 euros par mois (estimation associations de parents), l’écart reste important.

Conclusion : Trois Urgences pour les 70 000 Enfants TND

Enfant confiant portant une cape de super-héros rouge sur fond jaune, représentant l'estime de soi et l'empowerment des enfants avec troubles neurodéveloppementaux

Au terme de notre enquête, trois urgences s’imposent :

  1. Réduire drastiquement les délais diagnostiques — parce que chaque mois perdu est un mois de développement compromis
  2. Financer réellement l’accompagnement — pour que le code postal ou le compte en banque ne déterminent plus le destin d’un enfant
  3. Former massivement les professionnels — enseignants, médecins, AESH, pour que plus aucun parent ne s’entende dire « c’est de votre faute »

Ces mesures ont un coût. Mais l’inaction aussi a un coût — humain, social, économique. Chaque enfant non accompagné, c’est un adulte qui aura besoin de davantage de soutien. Chaque parent épuisé, c’est un actif qui quitte le marché du travail. Chaque famille brisée, c’est un tissu social qui se fragilise.

Sophie, la maman de Théo rencontrée au début de cette enquête, veut croire que les choses changent. « Quand j’ai commencé ce parcours il y a cinq ans, j’étais seule. Aujourd’hui, je vois des parents qui s’organisent, qui parlent, qui refusent de se taire. C’est ça qui fera bouger les lignes. »

70 000 enfants naissent chaque année avec un TND en France. Ce n’est pas une statistique. Ce sont 70 000 histoires, 70 000 familles, 70 000 avenirs qui se jouent.

Ressources et contacts utiles

  • Autisme Info Service — 0 800 71 40 40 (gratuit, du lundi au vendredi 9h-13h et 14h-17h, mardi 18h-20h) • autismeinfoservice.fr
  • HyperSupers TDAH France — Association reconnue d’utilité publique • tdah-france.fr
  • Fédération Française des DYS — Dyslexie, dysphasie, dyspraxie, dyscalculie • ffdys.com
  • Maison de l’Autisme — Dispositif national d’information et d’accompagnement • maisondelautisme.gouv.fr
  • Plateformes PCO — Coordination et orientation 0-12 ans • handicap.gouv.fr
  • UNAPEI — Inclusion scolaire et accompagnement des familles • unapei.org

Sources et Références

Sources institutionnelles françaises

  • Stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement 2023-2027, Délégation interministérielle — handicap.gouv.fr, novembre 2023
  • Rapport d’information du Sénat n°659 (2022-2023) « Prise en charge des troubles du neuro-développement : le compte n’y est pas », déposé le 31 mai 2023, Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa, Corinne Féret — senat.fr
  • Haute Autorité de Santé — Recommandations de bonne pratique : Trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), publiées le 23 septembre 2024 — has-sante.fr
  • INSERM — Dossier « Autisme » : données épidémiologiques et état des connaissances — inserm.fr
  • Loi n°2024-1028 du 15 novembre 2024 visant à améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neurodéveloppement et à favoriser le répit des proches aidants, Journal Officiel n°0271 du 16 novembre 2024 — legifrance.gouv.fr
  • Handicap.gouv.fr — Prévention des départs non souhaités en Belgique
  • Bilan du premier anniversaire de la Stratégie nationale TND 2023-2027 — solidarites.gouv.fr, novembre 2024

Sources internationales

  • Dike J.E., DeLucia E.A., Semones O., Andrzejewski T., McDonnell C.G., « A Systematic Review of Sexual Violence Among Autistic Individuals », Review Journal of Autism and Developmental Disorders, vol. 10, p. 576-594, publié le 22 mars 2022 — DOI: 10.1007/s40489-022-00310-0
  • NHS England Digital — Autism Waiting Time Statistics, October 2024 to September 2025 : 227 813 personnes en attente d’un diagnostic en septembre 2025 — digital.nhs.uk

Sources supplémentaires 2024-2025

  • Cour des comptes — « L’accueil des Français en situation de handicap en Wallonie », rapport conjoint avec la Cour des comptes de Belgique, publié le 17 septembre 2024 — ccomptes.fr
  • DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) — Panorama statistique des personnels de l’enseignement scolaire 2024-2025, publié en octobre 2025 — education.gouv.fr
  • UNAPEI — Campagne nationale #JaiPasÉcole (7e édition), lancée le 25 août 2025 : enquête auprès de 38 associations représentant 3 603 enfants — unapei.org / marentree.org
  • France Inter / DGESCO (Direction générale de l’enseignement scolaire) — Données exclusives sur les élèves sans AESH à la rentrée 2025 : 48 726 élèves sur 352 000 notifiés, révélées le 28 octobre 2025 dans le cadre de la commission d’enquête parlementaire sur les défaillances de prise en charge du handicap et de la santé mentale

Comment agir ?

  • Rejoindre une association de parents (Autisme France, TDAH France, FFDys, UNAPEI)
  • Témoigner sur les réseaux sociaux (#TND, #Autisme, #TDAH…)
  • Contacter votre député pour faire remonter les difficultés locales
  • S’informer et se former via la Maison de l’Autisme
  • Appeler Autisme Info Service : 0 800 71 40 40 (gratuit)
  • Soutenir les associations engagées auprès des familles
  • Sensibiliser votre entourage en partageant ces informations

FAQ : Troubles du Neurodéveloppement en France

Réponses aux Questions les Plus Fréquentes des Parents

Qu’est-ce qu’un TND exactement ?

Un trouble du neurodéveloppement (TND) est un trouble qui affecte le développement du cerveau et du système nerveux. Selon le DSM-5, les TND regroupent six grandes catégories : l’autisme (TSA), le TDAH, les troubles spécifiques des apprentissages (dyslexie, dysorthographie, dyscalculie), les troubles de la communication (dont la dysphasie), les troubles moteurs (dont la dyspraxie), et le trouble du développement intellectuel (TDI).

Ces troubles sont d’origine neurologique — ce n’est ni une maladie mentale, ni un problème d’éducation, ni la faute des parents. Les TND sont présents dès la naissance, même si les signes ne deviennent visibles qu’au fil du développement de l’enfant.

Mon enfant a-t-il vraiment un TND ou est-ce juste un retard de développement ?

C’est une question légitime que tous les parents se posent. Certains enfants ont effectivement un développement plus lent sans qu’il s’agisse d’un TND. Cependant, si vous observez plusieurs signes persistants — absence de babillage à 12 mois, pas de mots à 18 mois, évitement du regard, comportements répétitifs, difficultés dans les interactions sociales, ou toute régression des acquis — il est important de consulter.

Votre inquiétude de parent est en elle-même un signal que la HAS prend au sérieux.
L’intervention précoce fait toute la différence. Même si ce n’est finalement « qu’un retard », un accompagnement adapté ne fera que du bien à votre enfant. Ne perdez pas de temps à attendre que « ça passe ».

Les TND sont-ils de plus en plus fréquents ou en parle-t-on simplement davantage ?

Les deux. La prévalence apparente des TND a effectivement augmenté, mais cela s’explique principalement par : une meilleure connaissance des troubles, des critères diagnostiques élargis, un dépistage plus systématique, une meilleure formation des professionnels.

Pour l’autisme par exemple, en France on estime aujourd’hui qu’environ 1 enfant sur 100 naît avec un TSA — un chiffre qui a triplé en dix ans selon les études épidémiologiques. Aux États-Unis, les dernières données CDC (avril 2025) indiquent même 1 enfant sur 31. Cette augmentation reflète surtout qu’on identifie enfin des enfants qui auraient été « oubliés » par le passé.

Mon médecin me dit d’attendre, mais je sens que quelque chose ne va pas. Que faire ?

Faites confiance à votre instinct parental. Dans 79% des cas, les parents remarquent des signes inhabituels avant l’âge de 2 ans. Si votre inquiétude persiste malgré les rassurances, vous avez le droit de demander :

-Une orientation vers un pédiatre spécialisé en développement
-Un bilan auprès d’une PCO (Plateforme de Coordination et d’Orientation) si votre enfant a jusqu’à 12 ans
– Un rendez-vous dans un Centre de Ressources Autisme (CRA) si vous suspectez un TSA
– Des bilans libéraux (psychomotricité, orthophonie, ergothérapie)

N’attendez pas qu’on vous donne « l’autorisation » de vous inquiéter.

Combien de temps faut-il pour obtenir un diagnostic ?

Cela dépend du trouble et de votre localisation :

PCO (0-12 ans) : quelques semaines à 3 mois pour un premier rendez-vous
CRA pour l’autisme : 12 à 36 mois selon les régions (jusqu’à 18 mois en Île-de-France, parfois plus de 3 ans ailleurs)
TDAH : entre 3 et 6 ans d’errance diagnostique en moyenne, avec des files d’attente pouvant atteindre 2 ans dans les centres spécialisés
Troubles DYS : variable selon les professionnels disponibles

Ces délais sont inacceptables mais malheureusement réels. Pendant l’attente, les PCO permettent de commencer des interventions sans attendre le diagnostic final.

Le diagnostic peut-il se tromper ?

Les diagnostics TND, surtout lorsqu’ils sont posés par des équipes pluridisciplinaires expérimentées (CRA, services hospitaliers spécialisés), sont généralement fiables. Cependant :

Les diagnostics peuvent évoluer avec le temps : des troubles associés peuvent être identifiés ultérieurement (on parle de comorbidités). Par exemple, 30 à 80% des enfants autistes répondent également aux critères du TDAH.

Certains troubles se chevauchent : autisme et TDAH partagent des symptômes communs (difficultés attentionnelles, particularités sensorielles, défis sociaux). Avant 2013, il était même impossible de poser les deux diagnostics simultanément — ce n’est plus le cas depuis le DSM-5.

Les filles autistes sont souvent sous-diagnostiquées : elles reçoivent leur diagnostic en moyenne 1,5 à 2 ans plus tard que les garçons. Le ratio historique de 4 garçons pour 1 fille est aujourd’hui remis en question (probablement plus proche de 3 pour 1). Les outils de diagnostic, conçus historiquement sur des populations masculines, peinent à détecter les formes d’autisme plus discrètes, souvent mieux « camouflées » par les filles.

Si vous avez un doute sur un diagnostic, vous pouvez demander un second avis auprès d’une autre équipe spécialisée. C’est votre droit.

Que faire en attendant le diagnostic ?

Ne restez pas les bras croisés. La HAS recommande de démarrer les interventions AVANT le diagnostic — c’est même l’objectif principal des PCO. Vous pouvez :

– Contacter une PCO pour des bilans et interventions précoces (gratuits grâce au forfait précoce)
– Consulter des professionnels libéraux (psychomotricien, ergothérapeute, orthophoniste)
– Demander une guidance parentale — votre rôle est central
– Rejoindre des groupes de parents (associations, Facebook)
– Documenter les comportements de votre enfant (vidéos, journal)

Agir tôt améliore significativement les chances de succès des interventions.

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