Aujourd’hui, je voudrais aborder un sujet aussi délicat que crucial : l’explosion des diagnostics de troubles du neurodéveloppement (TND). Ces dernières années, le nombre d’enfants et d’adolescents identifiés comme porteurs de TDAH, de dyslexie, de troubles du spectre autistique ou encore de dyspraxie ne cesse d’augmenter. Faut-il s’en réjouir comme d’un progrès médical qui rend visible ce qui était ignoré ? Ou s’inquiéter d’une tendance à tout pathologiser dans le monde scolaire ? Entre réalité clinique, confusion pédagogique et effets sociétaux bien réels, il est temps de poser les bonnes questions.
Sommaire
Pourquoi les diagnostics explosent aujourd’hui : comprendre le contexte
Aujourd’hui, je veux qu’on s’arrête un moment et qu’on regarde cette vague qui nous submerge : les diagnostics de troubles neurodéveloppementaux (TND) explosent. Et ce n’est pas une impression.
Selon les données les plus récentes, un enfant sur six en France présente un TND. Cela représente près de 120 000 naissances par an, parmi lesquelles 15 000 bébés naissent avec un TSA (trouble du spectre de l’autisme). Ce chiffre, relayé par les autorités publiques, témoigne d’une réalité de plus en plus présente dans nos familles, nos écoles, nos suivis médicaux.
👉 Source – Ministère chargé des personnes handicapées
Partout, on entend parler d’autisme, de TDAH, de HPI, de dyslexie, de dyspraxie…
C’est devenu une sorte de décor permanent dans les discussions parentales, scolaires, sociales.
Et moi, je veux vous poser une question simple : pourquoi maintenant ?
Pourquoi cette explosion aujourd’hui ?
Est-ce qu’il y a vraiment plus de cas ?
Ou est-ce qu’on regarde tout simplement mieux ce qui existait déjà ?
Ou même… est-ce qu’on ne mélange pas tout ?
Est-ce vraiment nouveau ?
On pourrait croire que ces troubles ont toujours été là, mais mal repérés.
Et c’est vrai, en partie. Pendant des décennies, des enfants autistes ont été étiquetés “bizarres”, voire même “schizophrènes”. Des enfants TDAH ont été punis pour leur agitation. Des adultes HPI ont souffert en silence sans jamais comprendre leur décalage intérieur.
Alors oui, il est normal et sain qu’on fasse des progrès en dépistage.
Mais aujourd’hui, on assiste à autre chose : une multiplication spectaculaire des diagnostics, parfois sans recul, parfois sans nuance, souvent sans explication claire pour les familles.
Une société qui veut tout expliquer
Il y a des raisons légitimes à cela :
– La science a avancé
– Les médecins sont mieux formés
– Les parents sont plus attentifs
– L’école est plus vigilante
Mais il y a aussi d’autres facteurs à prendre en compte :
– Les réseaux sociaux, qui popularisent les termes sans toujours les expliquer
– Les médias, qui relaient les témoignages les plus extrêmes ou les plus viraux
– Une société entière, qui cherche à mettre des mots sur tout, à tout comprendre, à tout encadrer
C’est à la fois une avancée — parce qu’on sort du silence —
et un risque — parce qu’on peut aussi tomber dans l’excès d’interprétation.
Une tendance à surinterpréter
Je veux qu’on soit lucides.
Oui, les diagnostics ont augmenté parce qu’on sait mieux les repérer.
Oui, certains enfants, certains adultes, sont soulagés de comprendre enfin ce qu’ils vivent.
Mais non, ça ne veut pas dire que tout est trouble.
Que tout comportement un peu différent doit être médicalisé.
Et c’est là qu’il faut ouvrir les yeux.
Parce que derrière cette explosion des chiffres, il y a aussi une société qui change, qui perd ses repères, et qui doit apprendre à faire la différence entre repérer et surétiqueter, entre accompagner et enfermer.

Les vraies causes : quand l’environnement joue un rôle réel
Aujourd’hui, je veux qu’on parle des causes profondes, celles dont on ne parle pas assez, celles qui ne se voient pas toujours à l’œil nu, mais qui sont bien là. Parce que non, l’autisme, le TDAH, le HPI ne sont pas des inventions modernes. Ce sont des réalités, et parfois, l’environnement dans lequel on vit peut en être un déclencheur, ou un amplificateur.
Un monde saturé de facteurs invisibles
Notre environnement chimique, alimentaire, biologique a changé en quelques décennies seulement. On vit au milieu des perturbateurs endocriniens, des pesticides, des additifs, des microplastiques, des ondes électromagnétiques, des écrans.
Et tout ça, on le respire, on le mange, on l’applique sur notre peau, on l’absorbe sans même s’en rendre compte. Résultat : des corps plus fragiles, des cerveaux en développement plus sensibles, des enfants qui arrivent au monde avec un terrain parfois plus vulnérable.
Ce que dit la science aujourd’hui
Ce n’est pas une idée vague, ce n’est pas un fantasme de parent inquiet.
C’est documenté.
Des études sérieuses ont établi des liens entre l’exposition prénatale aux phtalates ou aux bisphénols A, présents dans de nombreux plastiques, et des troubles de l’attention ou du comportement.
D’autres recherches ont démontré que les enfants exposés à des niveaux élevés de pesticides ont plus de risques de développer des troubles cognitifs ou comportementaux.
Et ce n’est pas tout. L’OMS alerte aujourd’hui sur l’impact de la pollution de l’air sur le QI des enfants, sur leur capacité à se concentrer, à se réguler émotionnellement. Même le bruit ambiant constant (transports, alarmes, télé, etc.) est suspecté de dérégler le développement cognitif.
Une alimentation pauvre, un rythme de vie altéré
À cela s’ajoute ce qu’on donne à manger à nos enfants.
Des produits ultra-transformés, du sucre en excès, peu d’oméga-3, des carences en fer ou en iode. On parle souvent de troubles, mais on oublie que le cerveau a besoin de carburant — et ce carburant, aujourd’hui, il est souvent de mauvaise qualité.
Et puis, il y a les écrans.
Et le manque de sommeil.
Et le stress permanent des familles.
Tout cela ne crée pas directement un trouble, mais ça prépare un terrain, ça accentue des fragilités, ça déclenche parfois ce qui serait resté discret.
Ne pas tout mettre sur le dos de l’environnement
Je ne dis pas que tous les troubles viennent de là. Ce serait trop simple. Mais je dis que l’environnement compte, et qu’il faut le prendre en compte avec sérieux.
Et surtout, je dis qu’il ne faut pas inverser les rôles : ce n’est pas parce qu’un enfant est agité qu’il a mangé des biscuits industriels. Ce n’est pas parce qu’il est anxieux qu’il est autiste. Ce n’est pas parce qu’il rêve en classe qu’il est HPI.
Mais comprendre que notre monde a changé, que nos enfants naissent et grandissent dans un environnement surchargé, c’est un point de départ essentiel. Pas pour tout expliquer. Mais pour mieux accompagner.
Les nouvelles habitudes éducatives et sociales : facteur de confusion
Je vais maintenant vous parler de quelque chose qu’on évite souvent, mais qui est crucial : la place de l’éducation et de notre société dans tout ça. Parce que les enfants d’aujourd’hui ne sont pas élevés comme ceux d’hier, et ça change tout — parfois pour le meilleur, parfois pour le flou.
Une époque qui a peur du conflit
Il n’y a pas si longtemps, les enfants jouaient dans la rue, grimpaient aux arbres, tombaient, râlaient, s’ennuyaient. Aujourd’hui, tout est surveillé, calculé, organisé. L’environnement est plus sécurisé, mais aussi plus anxiogène. On a peur de l’échec, peur du bruit, peur de la différence.
Alors dès qu’un enfant sort un peu du cadre, qu’il pleure trop, qu’il bouge trop, qu’il parle “trop comme un adulte” ou “pas assez bien”, on s’interroge. On observe. Et parfois, on s’inquiète… trop vite.
Des enfants surexposés, des adultes surinformés
Les écrans sont partout. Et ça, ce n’est pas un jugement, c’est un constat. Beaucoup d’enfants passent plusieurs heures par jour devant une tablette, un téléphone ou une télé. Et ça a un impact direct sur leur développement : concentration réduite, interactions sociales appauvries, sommeil perturbé.
Un enfant surexposé aux écrans peut sembler inattentif, impulsif, fatigué, dans sa bulle. Est-ce un trouble ? Parfois oui. Mais souvent, c’est un effet de notre époque.
Ajoutons à ça l’hyperinformation des parents. On lit tout, on voit tout, on entend tout. On cherche à être des parents parfaits. Et face à la moindre difficulté, on veut comprendre. Diagnostiquer. Nommer. Mais la parentalité n’est pas une science exacte. C’est aussi du ressenti, du tâtonnement, du vécu.
L’éducation positive : une belle idée mal appliquée
Je crois profondément en l’éducation bienveillante. Mais je vois aussi que dans certains cas, elle devient une éducation sans cadre. On a peur de dire non. On a peur de frustrer l’enfant. On a peur de l’éteindre. Et à force de ne pas poser de limites claires, certains enfants finissent par être… perdus.
Des enfants qui crient, qui tapent, qui hurlent, qui refusent tout : parfois, ce ne sont pas des signes de trouble, mais un appel au cadre, un besoin de structure. Et ça, on l’oublie trop souvent.
Ce n’est pas une faute de parents. Mais c’est une réalité.
Je ne suis pas là pour accuser les parents. On fait tous du mieux qu’on peut. Mais je crois qu’on doit oser regarder en face que notre manière d’éduquer a changé. Et que parfois, elle crée des confusions.
Des enfants en crise qui ont juste besoin d’un adulte solide qui dit » Stop «
Des enfants anxieux qui ont juste besoin de ralentir.
Des enfants “trop” ceci ou “pas assez” cela qui ont juste besoin… qu’on les accompagne différemment.
Alors non, tout ne relève pas de l’éducation. Mais tout ne relève pas non plus du trouble.

Tout n’est pas un trouble neurodéveloppemental
Il faut que je vous dise quelque chose qui me tient profondément à cœur : tout n’est pas trouble. Tout n’est pas TSA. Tout n’est pas TDAH. Tout n’est pas HPI. Et pourtant, aujourd’hui, j’ai l’impression qu’on colle ces termes à la moindre différence. Comme si on n’avait plus le droit d’être juste… singulier.
Une génération d’enfants trop vite catégorisés
“Il a du mal à se concentrer en classe ? Peut-être TDAH.”
“Elle a peu d’amis ? Peut-être autiste.”
“Il comprend tout trop vite ? C’est sûrement un haut potentiel.”
Mais où est passée la nuance ?
Où est passée l’observation patiente, le temps qu’on laissait aux enfants pour grandir à leur rythme, avec leurs forces, leurs fragilités, leurs phases de vie ?
Je vois de plus en plus de parents perdus, épuisés, mais aussi… influencés. Influencés par ce qu’ils lisent sur les réseaux, parceque d’autres racontent à l’école, par cette pression sociale : il faut “savoir ce qu’il a”, mettre un mot dessus, un sigle, une fiche. Vite.
Parfois, c’est juste… la vie
Un enfant qui traverse une séparation parentale.
Un enfant qui déménage.
Un enfant qui est hypersensible, rêveur, timide, colérique, jaloux…
Tout ça, ça existe. Ce sont des émotions, des tempéraments, des étapes.
Et non, ça ne signifie pas toujours qu’il y a un trouble à diagnostiquer.
Parfois, ce qu’il faut, ce n’est pas un bilan. C’est du temps, du cadre, de la présence, un changement de rythme, de posture.
L’étiquette peut devenir un piège
Je ne dis pas qu’un vrai diagnostic enferme. Un bon diagnostic peut libérer, quand il est posé avec rigueur, écoute et prudence.
Mais poser une étiquette trop vite, c’est risquer de figer un enfant dans une case. C’est risquer de croire qu’il ne pourra jamais faire ceci, ou qu’il est incapable de cela. C’est aussi parfois projeter nos propres angoisses sur lui.
Et je le redis avec douceur, mais avec fermeté :
Tout enfant en difficulté n’est pas un enfant en trouble.
Et toute particularité n’est pas un handicap.
Adultes et autodiagnostics : pourquoi cet engouement ?
Là, on entre dans un sujet qui, franchement, me bouscule. Parce que je le vois de plus en plus autour de moi — sur les réseaux, dans les groupes de parole, dans les cafés entre copines : “je suis peut-être TDAH”, “je suis sûrement TSA”, “je crois que je suis HPI non identifié”. Et souvent, ça sort comme ça, entre deux gorgées de café ou deux scrolls sur Instagram.
Un besoin de comprendre… ou de justifier ?
Je ne dis pas que c’est faux. Je ne dis pas que les adultes concernés se trompent toujours. Il y a énormément de femmes, notamment, qui n’ont jamais été diagnostiquées et qui, en découvrant les TND tardivement, mettent enfin des mots sur des années d’incompréhension.
Et ça, je le respecte profondément.
Mais je vois aussi une tendance qui me gêne : le réflexe de l’autodiagnostic. On se sent débordée ? TDAH. Hypersensible ? TSA. On aime être seule ? Autiste. On n’arrive plus à se concentrer ? Neuroatypique.
Et si, parfois, ce n’était pas un trouble, mais un épuisement ? Une surcharge mentale ? Un burn-out parental ? Une vie qui va trop vite ? Une société qui nous broie ? On ne se pose pas toujours la bonne question. Et pourtant, elle est là, toute simple :
Est-ce que j’ai un trouble? Ou est-ce que je suis juste à bout ?
Une génération de femmes sous pression
J’ai une pensée particulière ici pour les mères.
Parce qu’on leur demande tout : être présentes, aimantes, organisées, sexy, patientes, fortes, souriantes… Et quand elles craquent, on leur tend le mot magique : neuroatypique.
Mais où est le droit d’être dépassée, sans forcément être différente ?
Où est la permission de ne pas aller bien, sans devoir mettre un sigle sur sa souffrance ?
Ce n’est pas l’étiquette qui guérit, c’est le chemin
Encore une fois, je ne nie pas les vrais diagnostics. Ils sont précieux, parfois vitaux. Mais je crois qu’on devrait être plus prudents.
Parce qu’on peut se reconnaître dans des traits sans pour autant être dans un trouble. Parce qu’on peut avoir besoin d’aide, sans avoir besoin de se définir par une case. Parce qu’on peut souffrir sans forcément devoir tout médicaliser.
Alors si vous vous posez la question, je vous en propose une autre avant :
Ai-je besoin d’un diagnostic ? Ou ai-je besoin d’aide, d’écoute, de repos, de répit, de douceur ?
L’école d’aujourd’hui : quand chaque différence devient un trouble
Je vais vous parler d’un sujet qui me tient particulièrement à cœur : l’école. Parce qu’aujourd’hui, j’ai l’impression que le moindre comportement hors norme est immédiatement suspecté d’être un trouble. Un enfant ne lit pas vite ? “Il est dyslexique.” Un enfant bouge sur sa chaise ? “Il est TDAH.” Un enfant regarde dans le vide ou répond avec un air un peu supérieur ? “C’est un HPI.” Et s’il a une moyenne en dessous de la norme ? Alors il est “à évaluer” d’urgence.
Mais à une époque, est-ce que nos propres parents étaient convoqués à l’école pour chaque mauvaise note ou chaque remarque ? Pas du tout. Et pourtant, on s’en est sortis.
Je me souviens très bien : un mot dans le carnet signifiait punition à l’école et punition à la maison. Il y avait une cohérence, une co-éducation entre l’école et les familles. Aujourd’hui, c’est tout l’inverse : l’école est devenue un lieu sous tension, où les enseignants sont à la fois débordés, désabusés et de plus en plus prudents.

Un système scolaire en échec… qui cherche à se décharger
Soyons clairs : le système scolaire est en souffrance. Classes surchargées, manque de moyens, absence de formation spécifique pour les élèves atypiques… Face à tout cela, que fait-on ?
On oriente. On diagnostique.
On préfère dire : “Allez consulter”, “Votre enfant a peut-être un trouble”, plutôt que d’admettre que l’école n’est plus en capacité d’accueillir la diversité des profils.
Et c’est là que je m’insurge. Parce que je suis maman d’un enfant avec un vrai TSA, avec handicap intellectuel associé. Je sais ce que c’est, le vrai besoin de prise en charge. Et pourtant, je vois bien que même lui, dans son quotidien, tout ne relève pas de son trouble. Il a un caractère, un tempérament, des caprices, comme n’importe quel enfant. Et c’est à moi, parent, d’ajuster, de comprendre, d’accompagner sans tout attribuer à l’autisme.
Revenir à l’autorité juste, à une éducation cohérente
Ce que je ressens profondément, c’est qu’on a perdu un équilibre. Il y a aujourd’hui une fracture entre l’école et les familles.
Des enseignants n’osent plus poser de cadre, par peur de se voir reprocher une punition. Certains parents menacent de porter plainte parce qu’un enfant a été mis cinq minutes sur un banc. On a peur de l’autorité. On a peur de mal faire. On veut tout “positiver”, tout “accompagner”, tout “analyser”.
Mais à force d’excuser, de justifier, de contourner… on n’élève plus. On excuse. On cède. On déresponsabilise.
Et je vais vous dire une chose avec beaucoup de sincérité : un enfant a besoin de cadre. Il a besoin de savoir ce qui est permis, ce qui ne l’est pas. Ce n’est pas de la violence. Ce n’est pas de la maltraitance. C’est de l’éducation.
Entre Montessori et Malcolm, il va falloir choisir (ou doser)
Alors oui, je vous dis ça avec un peu d’humour, mais aussi beaucoup de lucidité : entre l’éducation Montessori (que je respecte, que je connais, que j’utilise même parfois) et l’éducation de la maman dans Malcolm, il faudrait peut-être trouver un équilibre. Parce que là, franchement, ça part en vrille.
On a tellement voulu bien faire, qu’on n’ose plus être parents. On n’ose plus être enseignants. Et on laisse l’enfant au centre de tout, mais sans boussole.
Je ne dis pas qu’il faut revenir à la fessée ou à l’humiliation, évidemment. Mais entre bienveillance et autorité, il doit y avoir un pont. Une fermeté aimante. Un cadre sécurisant.
Et si, avant de courir chez un spécialiste, on commençait par remettre un peu de rigueur, de dialogue, de continuité entre maison et école, peut-être qu’on verrait déjà des choses s’améliorer.
Des spécialistes débordés, des délais qui explosent
Maintenant, je veux qu’on parle d’un autre effet de cette explosion des diagnostics et des demandes : les professionnels sont débordés. Et je ne parle pas de « un peu surbookés ». Je parle de listes d’attente qui durent un an, deux ans, parfois plus. De familles qui restent des mois sans réponse, sans suivi, sans solution.
Une réalité qu’on ne peut plus nier
Quand je discute avec d’autres parents, j’entends toujours les mêmes phrases :
“On nous a donné un rendez-vous dans 14 mois.”
“Le CMP m’a dit qu’il n’avait plus de place avant un an.”
“Le CRA a accusé réception… mais sans date.”
Et je ne parle même pas des libéraux. Une psychologue m’a confié qu’elle recevait près de 20 demandes par semaine, dont une bonne partie concernait des enfants qui ne relevaient pas d’un trouble, mais d’une difficulté passagère. Des enfants fatigués, désorientés, en souffrance émotionnelle, oui — mais pas forcément porteurs d’un TND.
Des professionnels à bout, des familles en errance
Ces spécialistes sont à bout. Ils font ce qu’ils peuvent. Mais ils ne peuvent pas tout. Et pendant ce temps-là, les enfants qui ont réellement besoin d’une évaluation, d’une prise en charge rapide, restent sur le carreau.
Un enfant avec un TSA sévère qui attend deux ans, pendant qu’un autre enfant prend la place parce que ses parents veulent “vérifier s’il n’est pas HPI”, ce n’est pas normal.
Et ce n’est pas de la faute des familles — c’est le système qui est mal orienté. Il manque des filtres intermédiaires, des lieux d’écoute, des accompagnements éducatifs qui ne passent pas forcément par la psychiatrie.
Réfléchir avant de saturer un système déjà à genoux
Je ne dis pas ça pour culpabiliser. Je dis ça pour responsabiliser.
Avant de lancer un parcours de diagnostic, on devrait tous pouvoir se demander :
Est-ce qu’il y a des choses que je peux essayer à la maison ?
Est-ce que j’ai déjà exploré d’autres pistes ?
Est-ce que ce que vit mon enfant est inquiétant, ou simplement difficile à traverser ?
Parce qu’à force de tout médicaliser, on épuise le système. Et ce sont les plus fragiles qui en paient le prix. Ceux pour qui chaque mois sans prise en charge est une perte de chance.

Parents, posez-vous les bonnes questions avant d’agir
Là, j’ai envie de m’adresser directement à vous, les parents. Parce que je sais ce que c’est. Je sais à quel point c’est angoissant, épuisant, bouleversant d’avoir un enfant qui va mal, qui “détonne”, qui ne rentre pas dans les cases.
Et je sais aussi à quel point il est tentant de vouloir une réponse rapide. Un mot. Un diagnostic. Un “c’est ça”. Ça rassure. Ça explique. Ça nous donne le sentiment de reprendre le contrôle. Mais parfois, il faut se poser d’autres questions avant.
Et si on commençait par regarder autrement ?
Avant d’aller frapper à la porte du CMP, du CRA ou du neuropsy, posez-vous ces questions-là — celles que personne ne vous posera si vous ne vous les posez pas vous-mêmes :
- Est-ce que je connais vraiment les grandes étapes du développement de l’enfant ?
- Est-ce que je sais faire la différence entre une opposition normale et une souffrance réelle ?
- Est-ce que je me suis demandé ce que mon enfant traverse en ce moment — à l’école, à la maison, dans son corps ?
- Est-ce que j’ai essayé de poser un cadre clair, constant, prévisible, sans être dur ?
- Est-ce que j’ai cherché à me former, à lire, à écouter d’autres parents, à tester d’autres approches ?
Ce n’est pas tout ou rien : c’est d’abord observer, ajuster, accompagner
Parfois, le problème n’est pas chez l’enfant. Il est dans la dynamique familiale, dans les tensions qu’on ne nomme pas, dans les modèles qu’on a reçus et qu’on répète sans le vouloir.
Et parfois, on est juste épuisé, et on projette tout ça sur lui.
C’est humain. Ça arrive à tout le monde.
Mais avant de pathologiser, il faut prendre le temps d’observer, de réajuster, de changer un peu notre posture, et de voir ce que ça donne.
Et si on se faisait aussi confiance ?
Je crois qu’on a perdu quelque chose de précieux : la confiance en soi en tant que parent.
Aujourd’hui, on pense qu’on a besoin d’un expert pour tout. Pour apprendre à dire non. Pour gérer une crise. Pour comprendre un regard.
Mais parfois, on a surtout besoin…
… de reprendre notre place.
… d’apprendre à poser une limite sans crier.
… de se reconnecter à notre intuition.
Et de se dire, simplement :
“Je vais l’aider à grandir. Pas à le transformer.”
Vivre avec un trouble, s’adapter sans s’enfermer
Aujourd’hui, je veux aussi vous dire quelque chose de très important :
avoir un trouble, ce n’est pas une fatalité. Ce n’est pas une fin. Ce n’est pas un mur.
Avoir un TDAH, un TSA modéré, ou être hautement sensible, ce n’est pas “être foutu”. C’est avoir un fonctionnement différent, parfois plus complexe à gérer, mais pas moins digne. Pas moins capable. Pas moins fort.
Ce n’est pas une maladie mortelle
Je vais être franche avec vous :
Un cancer, c’est une maladie qui peut tuer.
Un syndrome de Rett sévère, une maladie neurodégénérative, peut détruire les fonctions de base.
Mais un TDAH ?
Un TSA modéré ?
Un profil neuroatypique ? Ce sont des réalités qu’on peut apprendre à connaître, à apprivoiser, à vivre avec.
Je connais des gens qui ont traversé deuc cancers, qui ont été amputés, qui ont perdu un enfant — et qui se tiennent debout.
Alors oui, un trouble, c’est dur.
Mais ce n’est pas une excuse pour tout arrêter. Ce n’est pas un motif pour se dire : “Je ne peux pas.”
Un diagnostic, c’est une clé — pas une cage
Ce que je vois trop souvent, c’est qu’une fois que le mot est posé — TDAH, TSA, HPI — tout devient justifiable :
“Il ne veut pas ranger sa chambre, c’est à cause du TDAH.”
“Je ne supporte pas le bruit, c’est parce que je suis autiste.”
“Je suis impulsive, je suis neuroatypique.”
Non. Non.
Un diagnostic, c’est un outil de compréhension, pas un outil de renoncement.
C’est une clé pour avancer autrement, pas une excuse pour arrêter d’essayer.
On peut vivre avec. Et même très bien.
On peut créer, aimer, travailler, rire, tomber, se relever, réussir, avec un trouble.
Et on peut élever nos enfants en leur montrant que leur différence n’est pas une faiblesse, mais un point de départ pour inventer leur propre chemin.
Ce n’est pas parce qu’on est neuroatypique qu’on est incapable.
Ce n’est pas parce qu’on est différent qu’on doit s’interdire de rêver, d’apprendre, de participer au monde.
Alors oui, adaptons.
Oui, ajustons.
Mais surtout : n’abandonnons jamais l’idée de progresser.
Ressources utiles, repères et pistes pour aller plus loin
Parce que réfléchir, c’est bien. Mais agir en connaissance de cause, c’est encore mieux.
Et je sais qu’après avoir lu tout ça, tu te poses peut-être encore mille questions :
“Est-ce que je suis passé(e) à côté de quelque chose ?”,
“Est-ce que je dramatise ou pas assez ?”,
“Qu’est-ce que je peux faire, concrètement, maintenant ?”
Alors je te propose ici des pistes. À lire, à écouter, à explorer.
Sans pression. Sans précipitation. Juste pour avancer.
Livres à lire (et à relire)
- Je suis autiste et je vais bien, merci – Alexandra Reynaud
Témoignage lumineux d’une adulte autiste, sans pathos ni caricature. - L’adulte surdoué – Monique de Kermadec
Pour comprendre enfin ce qu’est vraiment le haut potentiel. Pas les fantasmes. - Vivre avec un TDAH – Dominique Dupagne
Un guide clair, bienveillant, utile à tous les âges de la vie. Simple et sérieux.
Podcasts, webinaires, vidéos
- Podcast “La Matrescence” – Des épisodes autour de la parentalité, de l’éducation et de la neurodiversité.
- Webinaires gratuits de l’INSHEA ou de l’INSERM – Pour comprendre les troubles sans tomber dans la désinformation.
- Chaîne YouTube “Comprendre l’autisme” (CRA) – Des contenus courts, validés, et pédagogiques.
Figures inspirantes (et bien vivantes)
- Temple Grandin – Autiste, experte du comportement animal. Elle a changé l’industrie agroalimentaire.
- Daniel Tammet – Autiste Asperger, génie des langues, écrivain. Sa différence est son moteur.
- Greta Thunberg – Diagnostiquée TSA. Elle en a fait un levier pour porter une cause mondiale.
Ces personnes n’ont pas été définies par leur diagnostic.
Elles l’ont intégré à leur chemin.
Et c’est ça qui change tout.
Et toi, tu peux aussi te poser ces questions…
- Est-ce que je suis épuisé·e… ou en souffrance réelle ?
- Est-ce que j’ai pris le temps de distinguer le trouble du contexte ?
- Est-ce que j’ai exploré d’autres causes : burn-out, trauma, anxiété, hypersensibilité ?
- Est-ce que je me reconnais dans un portrait clinique… ou juste dans une description partagée sur Instagram ?
Parce que non, un quiz TikTok n’est pas un diagnostic.
Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait de tout ça ?
Aujourd’hui, je vous ai écrit un article qui, je le sais, dérange.
Mais je l’ai écrit avec le cœur.
Avec l’envie profonde de vous faire réfléchir, de secouer un peu les idées reçues, de poser les questions que beaucoup n’osent plus poser à voix haute.
Parce qu’au fond, ce qui me tient à cœur, ce n’est pas de juger.
Ce n’est pas de diviser.
Ce n’est pas de pointer du doigt les parents, les enfants, les adultes, les spécialistes.
C’est de remettre un peu de nuance, de discernement, de justesse dans nos lectures du monde.
Oui, les troubles existent.
Oui, l’autisme, le TDAH, le haut potentiel, la dyspraxie, tout cela est bien réel, et mérite d’être reconnu, accompagné, soutenu.
Mais non, tout n’est pas forcément un trouble.
Non, tout ne s’explique pas toujours par un étiquetage médical.
Parfois, la solution ne se trouve pas dans un bilan, mais dans un livre.
Pas dans un diagnostic, mais dans une formation, un échange, une écoute sincère.
Parfois, c’est l’éducation, la patience, le lien, le temps, qui font la différence.
Pas une lettre sur un compte-rendu.
Et vous ?
À la fin de cet article, je vous invite à vous poser.
À respirer.
À faire le tri.
Est-ce que vous êtes prêts à regarder vos enfants, vos proches, vous-même…
avec un peu plus de nuances ?
Un peu plus de bienveillance ?
Un peu plus de liberté intérieure, aussi ?
Est-ce que vous êtes prêts à vivre avec les différences…
sans vous y enfermer ?
Moi, je crois qu’on en est tous capables.
Parce qu’au fond, ce n’est pas la mode du trouble qui nous définit.
C’est ce qu’on fait de notre vie, de nos forces, de nos failles.
Et ça, ça mérite qu’on s’y engage. Pleinement. Et ensemble.
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