Il y a des conversations plus difficiles que d’autres, et évoquer le handicap de son enfant avec son propre entourage en fait souvent partie. Les réactions sont imprévisibles. Certains écoutent avec sincérité et posent des questions pertinentes, d’autres cherchent à minimiser, à donner des conseils qu’on ne leur a pas demandés. Parfois, ce sont des regards pleins d’incompréhension, des remarques maladroites qui, sans être mal intentionnées, laissent un goût amer.
Le plus difficile, ce n’est pas tant d’expliquer, mais de le faire sans ressentir ce besoin de se justifier. Il existe une frontière ténue entre informer et devoir prouver que ce que l’on vit est bien réel. Or, ce que vit votre enfant, ce que vous vivez en tant que parent, n’a pas besoin d’être validé par qui que ce soit.
Alors, comment en parler sans que cela devienne un exercice d’épuisement mental ? Comment répondre aux questions sans se sentir sur la sellette ? Comment faire comprendre certaines réalités sans avoir l’impression d’être jugé(e) ou contraint(e) de convaincre ?
L’entourage : entre bienveillance et incompréhension
Lorsque l’on commence à parler du handicap de son enfant, on réalise vite que chacun a sa propre perception du sujet. Certains réagissent avec une vraie empathie, posent des questions sincères et cherchent à comprendre. D’autres, en revanche, ont des réflexions déroutantes. « Tu es sûr(e) ? Il a l’air normal… » ou encore « Avant, on ne collait pas d’étiquettes aux enfants, on les laissait vivre… »
Ces remarques sont blessantes, non pas parce qu’elles remettent en question ce que vous savez déjà, mais parce qu’elles révèlent une profonde incompréhension du quotidien que vous traversez. L’une des phrases les plus difficiles à entendre, et pourtant si fréquente, c’est : « Ça va aller, tu verras, il va s’en sortir ! » Comme si un simple élan de motivation suffisait à faire disparaître un trouble neurodéveloppemental ou un handicap moteur.
Ces réactions s’expliquent par une méconnaissance du handicap. Beaucoup de gens n’y ont jamais été confrontés directement et l’imaginent de façon extrême ou, au contraire, le banalisent complètement. Ils ne comprennent pas ce que cela implique au quotidien et, parfois, même lorsqu’on leur explique, ils ne l’entendent pas vraiment.
Faut-il pour autant insister et leur faire comprendre à tout prix ?
Trouver les bons mots : en dire juste assez
Il est tentant de vouloir tout expliquer en détail, en pensant que cela évitera les malentendus. Mais en réalité, plus on en dit, plus on s’expose aux jugements. Il n’est pas nécessaire de toujours donner des précisions. Une simple phrase peut suffire : « Mon enfant a un trouble du développement qui demande certaines adaptations. » Il est possible d’adapter son discours selon l’interlocuteur. Au travail, il suffit de dire : « J’ai parfois des rendez-vous médicaux pour mon enfant, merci de votre compréhension. » Avec un ami proche, on peut aller plus loin si on en ressent le besoin.
S’autoriser à ne pas tout dire, c’est aussi se protéger. Il n’est pas obligatoire d’expliquer le fonctionnement du cerveau neuroatypique ou le long parcours du diagnostic à chaque conversation.
Les remarques maladroites : comment réagir ?
Quoi que l’on fasse, il y aura toujours des phrases qui feront tiquer. « Moi aussi, mon fils est un peu hyperactif, mais il faut juste qu’il se défoule ! » ou encore « Tu devrais essayer cette méthode, j’ai entendu que ça marche super bien ! »
Face à cela, plusieurs approches sont possibles. Certains parents choisissent l’humour pour désamorcer : « Ah oui ? Je vais en parler au médecin, tiens ! » D’autres préfèrent répondre simplement et sans laisser place au débat : « Chaque enfant est différent, on fait ce qui est adapté pour lui. »
Il n’est pas nécessaire de se justifier. Si une personne insiste ou remet en question ce que vous dites, il est tout à fait possible de couper court en disant : « Ce n’est pas un sujet que j’ai envie d’aborder aujourd’hui. » Mettre des limites, c’est aussi préserver son énergie.
Transformer son entourage en soutien
L’entourage peut être source d’incompréhensions, mais il peut aussi devenir un précieux soutien. Il ne s’agit pas de chercher à éduquer tout le monde en permanence, mais parfois, une simple orientation vers un article, un livre ou une vidéo peut suffire à mieux faire comprendre la situation.
Il est également important d’exprimer clairement ses besoins. Beaucoup de proches ne savent pas comment réagir et font des maladresses sans le vouloir. Dire simplement : « Ce dont j’ai le plus besoin, c’est d’écoute et de bienveillance, pas de conseils. » peut aider à clarifier les attentes sans blesser.
Mais il faut aussi accepter que certaines personnes ne comprendront jamais totalement. Ce n’est pas grave. On n’a pas besoin de convaincre tout le monde.
Se préserver émotionnellement
Ce que beaucoup de gens ignorent, c’est à quel point toutes ces discussions peuvent être épuisantes. Devoir répéter, expliquer, affronter les remarques, supporter le regard des autres, c’est une charge mentale invisible mais bien réelle.
C’est pourquoi il est essentiel de choisir ses batailles. Il n’est pas nécessaire de s’engager dans chaque conversation et d’essayer de tout expliquer à tout le monde. Mieux vaut consacrer son énergie aux personnes qui apportent un vrai soutien et s’entourer de ceux qui comprennent, que ce soit des amis, d’autres parents concernés ou des espaces où l’on peut parler sans crainte d’être jugé(e).
Conclusion : vous n’avez rien à prouver
Parler du handicap de son enfant n’est pas une justification, c’est un choix personnel. Ce qui compte, ce n’est pas de convaincre les autres, mais de se sentir en paix avec ses propres mots. Vous êtes le ou la mieux placé(e) pour savoir ce qui est bon pour votre enfant. Vous faites déjà énormément, et cela suffit. Vous êtes un parent formidable, et ça, personne ne peut le remettre en question.