Un guide pour comprendre la bumétanide et le LIT-002, les traitements de l’autisme en mots simples

Bumétanide et LIT-002 : le point complet sur les traitements de l’autisme, expliqué clairement
Sommaire
Chers parents,
Bumétanide, LIT-002 et Ocytocine , ces mots circulent partout, porteurs d’espoir pour nos enfants. Mais entre les annonces scientifiques et la réalité du terrain, il y a souvent un gouffre. Cet article fait le point, honnêtement et sans jargon, sur ces deux pistes de recherche dont tout le monde parle. Vous y trouverez ce qui a fonctionné, ce qui a échoué, et surtout : ce que vous pouvez raisonnablement espérer en 2025. Ni faux espoirs, ni pessimisme. Juste les faits, expliqués simplement.
1. La bumétanide : l’histoire d’un espoir… compliqué
C’est quoi, au juste ?
La bumétanide, c’est avant tout un diurétique – un médicament qui fait faire pipi. Oui, vraiment ! Il est normalement prescrit pour des problèmes cardiaques ou rénaux. Mais les chercheurs ont découvert qu’il pourrait aussi agir sur le cerveau.
Comment ça marcherait ?
Imaginez que dans le cerveau des enfants autistes, il y aurait trop de « chlore » dans certains neurones. Ce surplus perturberait la façon dont les cellules du cerveau communiquent entre elles, un peu comme si le signal était brouillé. La bumétanide agirait comme un « régulateur » en diminuant ce chlore et en permettant à un neurotransmetteur important (le GABA) de mieux faire son travail.
En langage maman : le médicament aiderait à « déboucher » les communications dans le cerveau.
Les résultats encourageants… puis mitigés (2010-2020)
Entre 2010 et 2020, plusieurs essais pilotes et de phase 2 ont été menés dans différents pays (France, Chine, Pays-Bas, Suède, Grande-Bretagne, Tunisie). Certains ont rapporté des résultats prometteurs :
- Dans une étude française sur 60 enfants, 77% des enfants traités ont montré une amélioration du diagnostic clinique
- Les scores CARS (qui mesurent la sévérité de l’autisme) sont passés du niveau « élevé » au niveau « moyen » chez certains participants
- Les parents témoignaient que leur enfant était plus « présent », communiquait mieux, interagissait davantage
Mais attention : ces différents essais ont donné des résultats hétérogènes, et certaines études n’ont pas retrouvé ces bénéfices. La vraie épreuve restait à venir : les grandes études de phase 3.
Le grand coup de froid : l’échec de 2021
Puis est arrivée la phase 3 – la grande étude finale avant la mise sur le marché.
En septembre 2021, les laboratoires Servier et Neurochlore ont annoncé un échec : deux études portant sur plus de 420 enfants dans 40 centres (Europe, Brésil, Australie) n’ont montré AUCUNE supériorité de la bumétanide par rapport au placebo. Aucun des critères d’efficacité n’a été atteint, ni pour les 2-6 ans, ni pour les 7-17 ans.
Imaginez la déception des familles qui avaient tant espéré…
⚠️ Point important à comprendre
Ce n’est pas que le médicament ne fonctionne pas DU TOUT. C’est que, dans un grand groupe très varié d’enfants autistes, l’effet moyen n’était pas assez fort pour se distinguer du placebo. C’est là que l’histoire devient intéressante…
Le rebondissement : l’intelligence artificielle à la rescousse

Le Professeur Yehezkel Ben-Ari, le chercheur marseillais qui a développé ce traitement, n’a pas baissé les bras. Il a eu une idée : et si l’autisme était TELLEMENT varié que certains enfants répondaient très bien au traitement, mais que d’autres pas du tout ?
Son équipe a utilisé l’intelligence artificielle pour réanalyser TOUTES les données de la phase 3. Résultat ? Une ré-analyse interne (Neurochlore) suggère qu’environ 30 à 40% des enfants pourraient répondre positivement au traitement. Ces analyses n’ont pas encore été validées par publication scientifique indépendante, mais l’hypothèse est que le problème n’était pas le médicament, mais le fait qu’on le donnait à tout le monde sans distinguer qui pourrait en bénéficier.
C’est comme si on donnait le même médicament contre les allergies à tout le monde, alors que certains sont allergiques aux pollens, d’autres aux acariens, et d’autres pas du tout allergiques !
Où en est-on aujourd’hui ? (2025)
- Des travaux récents hors Europe rapportent des résultats positifs sur des cohortes modestes (environ 80 enfants), mais ils ne renversent pas les données négatives des grandes phases 3
- Le Pr. Ben-Ari cherche à lever 3-4 millions d’euros pour une nouvelle phase 2/3 ciblée
- L’objectif : identifier à l’avance quels enfants répondraient au traitement grâce aux données de l’IA
- Des études ciblées sont en préparation pour vérifier cette hypothèse de sous-groupes répondeurs
- Si cette approche fonctionne, ce pourrait devenir le premier traitement ciblant les symptômes cœur de l’autisme (interaction sociale et communication) – à noter qu’il existe déjà des médicaments approuvés pour certains symptômes associés comme l’irritabilité
Les effets secondaires à connaître
Soyons clairs : la bumétanide n’est pas sans risques. Les effets secondaires documentés incluent :
- Envie fréquente d’uriner (c’est un diurétique !)
- Baisse de potassium dans le sang (nécessite une supplémentation et surveillance)
- Perte d’appétit et déshydratation possible
- Fatigue (asthénie)
- Les effets sont réversibles : si on arrête le traitement, certains troubles peuvent réapparaître
Dans certains essais, ces effets secondaires ont été suffisamment importants pour motiver l’arrêt du traitement chez plusieurs patients, surtout à doses élevées.
2. LIT-002 : la nouvelle piste qui fait parler d’elle

L’hormone de l’amour et l’autisme
Vous avez peut-être entendu parler de l’ocytocine, qu’on appelle parfois « l’hormone de l’amour » ou « l’hormone du câlin ». C’est elle qui aide les mères à accoucher, à allaiter, et surtout à créer des liens d’attachement avec leur bébé. Mais elle fait bien plus : elle joue un rôle crucial dans notre capacité à comprendre les émotions des autres, à décoder les expressions du visage, à se sentir en confiance.
Les chercheurs ont observé que beaucoup d’enfants autistes avaient des niveaux plus faibles d’ocytocine. D’où l’idée : et si on leur en donnait ?
Le problème avec l’ocytocine naturelle
Malheureusement, l’histoire de l’ocytocine en spray nasal pour l’autisme a été décevante. Une grande étude publiée en 2021 dans le prestigieux New England Journal of Medicine sur 290 enfants et adolescents n’a montré AUCUN bénéfice statistiquement significatif. Pourquoi ?
- L’ocytocine naturelle a une demi-vie très courte (3 à 6 minutes seulement dans le sang)
- Elle est détruite très rapidement par le foie
- La question de son accès au cerveau par spray nasal reste débattue scientifiquement
- Elle est trop grosse pour traverser facilement la barrière qui protège le cerveau
C’est là qu’entre en scène LIT-002, une molécule révolutionnaire découverte à Strasbourg.
LIT-002 : 20 ans de recherche
Le Professeur Marcel Hibert, de l’Université de Strasbourg, a consacré 20 ans de sa vie à créer une molécule qui aurait les qualités de l’ocytocine… sans ses défauts. Son équipe a travaillé sur des milliers de molécules candidates différentes. Une molécule appelée LIT-001 a d’abord montré des résultats prometteurs, puis l’équipe a développé LIT-002.
Qu’est-ce qui rend LIT-002 spéciale ?
- Elle imite l’ocytocine mais de façon différente – c’est ce qu’on appelle un « agoniste non peptidique » du récepteur de l’ocytocine
- Objectif : traverser la barrière du cerveau (contrairement à l’ocytocine naturelle) – les premières molécules de cette famille se sont montrées actives dans le cerveau de souris
- Elle serait plus stable dans le corps – c’est l’un des objectifs clés du programme
- Prise orale envisagée – l’un des buts du développement, mais pas encore confirmé publiquement pour LIT-002
- Efficace à doses faibles dans les modèles précliniques
Les résultats sur les animaux : très prometteurs
Les tests précliniques publiés (notamment dans Journal of Medicinal Chemistry en 2018 pour LIT-001) ont montré que cette famille de molécules améliore significativement les interactions sociales dans des modèles de souris présentant des traits autistiques. Les souris traitées étaient plus curieuses des autres, communiquaient mieux, montraient moins de comportements répétitifs.
Attention : ce qui marche chez la souris ne marche pas toujours chez l’humain ! Mais c’est un premier pas nécessaire et encourageant.
Le calendrier réaliste
La start-up Occentis a été créée en février 2024 pour développer cette molécule. Le CNRS et la SATT Conectus évoquent un horizon de 6 à 10 ans avant une éventuelle mise à disposition – c’est le délai typique du développement d’un médicament.
Voici ce qu’on sait :
- Premiers essais cliniques humains : envisagés quand le financement et les autorisations réglementaires seront obtenus (pas de date officielle publiée ou enregistrée publiquement à ce jour)
- Indication prioritaire possible : dépendance à l’alcool pour les premiers tests (plus facile à mesurer que l’autisme), selon la presse locale alsacienne
- Essais sur l’autisme : viendront ensuite si les premiers résultats sont positifs
- Mise sur le marché potentielle : au plus tôt dans 8-10 ans (si tout va bien)
Oui, c’est long. Le développement d’un médicament prend toujours des années. C’est frustrant, mais c’est pour garantir la sécurité de nos enfants.
Ce que LIT-002 pourrait aider (hypothèses)
Selon les chercheurs, ce type de molécule pourrait aider les enfants autistes à :
- Décoder les émotions sur les visages (reconnaître un sourire, des sourcils froncés)
- Comprendre les codes sociaux et les interactions
- Ressentir plus d’empathie et de connexion avec les autres
- Se développer plus facilement dans leur contexte social
3. Qu’est-ce que tout ça signifie pour nous, parents ?
Gardons espoir… avec réalisme
La vérité, c’est que nous sommes dans une période de transition passionnante mais frustrante :
- Pour la bumétanide : Les grandes études de phase 3 n’ont pas montré de bénéfice moyen. Une hypothèse de sous-groupes répondeurs (30-40%) existe mais n’est pas encore validée scientifiquement. Les recherches continuent pour identifier à l’avance quels enfants pourraient répondre.
- Pour LIT-002 : Les résultats sur animaux sont encourageants, la molécule est brevetée, une start-up dédiée existe, mais aucun essai humain n’est encore enregistré publiquement. Il faudra encore plusieurs années avant de savoir si ça marche vraiment chez les humains.
Ce qui est important à retenir
Comparaison des traitements en développement
Tableau récapitulatif pour les parents
| Bumétanide | LIT-002 |
|---|---|
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Stade actuel
Recherche active avec IA pour identifier les répondeurs (après échec phase 3)
En recherche
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Stade actuel
Développement préclinique, premiers essais humains envisagés (pas de date officielle)
Préclinique
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Points forts
Médicament existant et globalement sûr, plusieurs essais réalisés
Bien étudié
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Points forts
Molécule spécialement conçue, résultats précliniques prometteurs
Innovation
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Défis
Échec des deux grandes phases 3 en 2021, besoin de cibler les bons patients
Phase 3 négative
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Défis
6-10 ans minimum avant mise sur le marché possible
Long terme
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Disponibilité
Pas approuvé officiellement pour l’autisme (hors essais cliniques)
Non disponible
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Disponibilité
Pas avant plusieurs années (au plus tôt 2032-2034)
2032-2034
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Effets secondaires
Documentés – diurétique avec risques (hypokaliémie, déshydratation, fatigue)
Connus
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Effets secondaires
Inconnus chez l’humain à ce stade
À déterminer
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Ce qu’il NE faut PAS faire
🚫 ATTENTION – NE PAS FAIRE
- Ne demandez PAS à votre médecin de prescrire de la bumétanide hors essai clinique – c’est un diurétique avec des risques réels (baisse de potassium, déshydratation) et son efficacité n’est pas démontrée dans les grandes études
- N’achetez PAS de l’ocytocine en spray sur Internet – la grande étude scientifique de 2021 a montré qu’elle n’apporte pas de bénéfice pour l’autisme
- Ne suivez PAS les « protocoles miracles » non validés scientifiquement
Ces traitements ne sont pas encore approuvés. Attendre les résultats des essais cliniques, c’est protéger nos enfants.
Ce que vous POUVEZ faire
- Rester informé sur les essais cliniques en cours (votre neurologue ou centre spécialisé peut vous aider)
- Continuer les interventions comportementales et éducatives qui restent aujourd’hui la pierre angulaire du traitement, pendant que la recherche avance
- Rejoindre des associations de parents pour partager expériences et informations
- Garder espoir tout en restant réaliste sur les délais
- Soutenir la recherche si vous le pouvez (dons, participation aux études, etc.)
En conclusion : l’espoir est là, mais patience requise

Ces deux pistes de recherche – la bumétanide et le LIT-002 – représentent de véritables avancées scientifiques. Ce ne sont pas des mirages, ni des fausses promesses. Ce sont des années de travail rigoureux de chercheurs dévoués.
Mais la science prend du temps. Elle a besoin de rigueur, de patience, de vérifications. Chaque étape – aussi frustrante soit-elle – est là pour protéger nos enfants.
La bonne nouvelle ? Contrairement à il y a 20 ans, on comprend ENFIN mieux les mécanismes neurologiques de l’autisme. On ne cherche plus à l’aveugle. L’intelligence artificielle, les nouvelles technologies, la médecine personnalisée, une meilleure compréhension du rôle du GABA et de l’ocytocine… tout cela nous donne des outils qu’on n’avait pas avant.
Pour nos enfants d’aujourd’hui, ces traitements viendront peut-être trop tard. Mais pour ceux de demain, ces recherches sont en train de changer la donne.
En attendant, continuons à aimer nos enfants tels qu’ils sont, à les accompagner de notre mieux, et à garder espoir dans les progrès de la science.
💚 Ressources utiles
- Neurochlore (bumétanide) : www.neurochlore.fr
- Occentis (LIT-002) : www.occentis.com
- Blog du Pr. Ben-Ari : leblogdebenari.com
- CNRS Le Journal (articles sur l’ocytocine) : lejournal.cnrs.fr
- Pour vérifier les essais cliniques en cours : clinicaltrials.gov (rechercher « bumetanide autism » ou « oxytocin autism »)
Article rédigé en novembre 2025
Sources : CNRS, Neurochlore, Occentis, Servier, études scientifiques publiées (NEJM 2021, Journal of Medicinal Chemistry 2018, communiqués de presse officiels)
On vous propose la lecture de :
Autisme Et Trouble Du Spectre : Inserm, Fondation Pour La Recherche – 2025
Le Flapping Chez L’Enfant : Guide Complet Pour Les Parents – 2025
❓ FAQ – QUESTIONS FRÉQUENTES
1. Mon médecin peut-il prescrire de la bumétanide pour mon enfant autiste ?
Techniquement oui, mais ce n’est pas recommandé. Les deux grandes études de phase 3 n’ont pas montré d’efficacité moyenne, et c’est un diurétique avec des effets secondaires réels (baisse de potassium, déshydratation). L’hypothèse des « répondeurs » identifiés par IA n’est pas encore validée scientifiquement.
2. Quand le LIT-002 sera-t-il disponible ?
Au plus tôt en 2032-2034, si tout se passe bien. Aucun essai humain n’a encore commencé. Le développement complet d’un médicament prend 8 à 10 ans minimum pour garantir sécurité et efficacité.
3. L’échec de la phase 3 signifie-t-il que la bumétanide ne marche pas du tout ?
Non. Ça signifie que sur un grand groupe varié d’enfants autistes, l’effet moyen n’était pas significatif. Une ré-analyse par IA suggère que 30-40% des enfants pourraient en bénéficier, mais on ne sait pas encore lesquels avant le traitement. Des études ciblées sont en préparation pour vérifier cette hypothèse.
4. Que puis-je faire en attendant ces traitements ?
Continuez les prises en charge qui fonctionnent : interventions comportementales (ABA, TEACCH, etc.), orthophonie, psychomotricité, adaptations scolaires. Ces approches ont fait leurs preuves et resteront essentielles même si des traitements médicamenteux arrivent un jour.
5. Puis-je acheter de l’ocytocine en spray sur Internet ?
Non, ne le faites pas. Une grande étude scientifique de 2021 sur 290 enfants a montré que l’ocytocine en spray nasal ne fonctionne pas pour l’autisme. Acheter des médicaments sans prescription est illégal, dangereux, et inefficace.
6. Faut-il garder espoir pour l’avenir ?
Oui, absolument. La recherche avance : on comprend mieux les mécanismes de l’autisme, l’intelligence artificielle permet d’identifier des sous-groupes répondeurs, et de nouvelles molécules sont en développement. Mais la science prend du temps. En attendant, votre amour, votre soutien et les prises en charge actuelles sont ce qu’il y a de plus précieux pour votre enfant.
💙 Pour plus d’informations fiables : Consultez votre médecin spécialiste ou votre Centre de Ressources Autisme (CRA).



